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Le blog de Paul Quilès

Réflexions et informations sur la paix et le désarmement nucléaire, sur la démocratie et sur l'actualité politique.

Traiter enfin les causes du désordre !

Publié le 15 Septembre 2015 par Paul Quilès in International et défense

Traiter enfin les causes du désordre !Traiter enfin les causes du désordre !

       "Pendant combien de temps encore va-t-on tourner en rond?" C'est ce que je me disais ce matin en écoutant la radio. On y commentait abondamment l’annonce imminente de frappes françaises en Syrie et l’on affirmait doctement qu’il faudrait quand même s’intéresser aux causes du flux de réfugiés qui trouble tant l’Europe en ce moment.

 

      Que de temps perdu ! Que de tergiversations ! J’ose à peine rappeler ce que je ne cesse, avec d’autres, de répéter depuis des mois. Je n’ai rien à retirer à ce que j’écrivais le 2 mars dernier dans une tribune au titre très parlant -« Syrie: il est urgent d’agir pour éteindre l’incendie »et dans laquelle je m’inquiétais d’une passivité coupable susceptible de créer une situation dramatique, dont une des conséquences serait des mouvements de réfugiés de grande ampleur.

 

      Cette situation, nous y sommes….malheureusement. On n’en sortira pas avec des positionnements politiciens, des surenchères verbales et des approximations peu glorieuses. Le plus urgent est d’analyser lucidement les choses, en commençant par comprendre quelles sont les forces en présence et leurs objectifs (écouter ICI).

 

      Le sujet est complexe, parce que la plupart des intervenants ont eu (ou ont encore) des positions ambigües, voire contradictoires : la Turquie, les pétromonarchies du Golfe, l’Iran, la Russie, les Etats-Unis et même la France.

 

       Il est encore plus complexe si l’on veut bien se souvenir  des évènements qui ont contribué à la profondeur des drames que vivent actuellement les populations du Moyen- Orient. Sans remonter aux erreurs qu’ont commises les puissances occidentales à la suite de la seconde guerre mondiale (traité de Sèvres, puis de Lausanne), il suffit de citer quelques dates :

      - 1979 : invasion de l’Afghanistan par l’Armée Rouge, qui sera combattue par les Moudjahidines afghans et les Islamistes (Ben Laden), soutenus et financés par l’Arabie Saoudite, le Pakistan et les Etats-Unis.

     - 1983 : le Hezbollah, soutenu par l’Iran et la Syrie, chasse les forces américaines et françaises du Liban.

      -1989-89 : départ des forces soviétiques d’Afghanistan, qui prélude à la prise de pouvoir des talibans et au développement d’Al Qaïda.
      - 1990 : 1ère guerre du Golfe, suivie par le maintien des Américains en Arabie Saoudite, qu'utilise le Saoudien Ben Laden pour développer son réseau en encourageant le sentiment anti-américain et anti-occidental ; par ailleurs, la promesse faite aux Etats arabes par les USA de favoriser la création d’un Etat palestinien après la guerre n’est pas tenue…

      - années 90 : série d’attentats contre les intérêts américains, qui culmine avec la destruction des tours du World Trade Center le11 septembre 2001

    - 2001- 2014 : intervention internationale (ONU) en Afghanistan, puis maintien des forces américaines.

     - 2003- 2011 : intervention américaine en Irak et longue présence de forces militaires dans le pays, tout en soutenant un régime corrompu, inefficace et sectaire.

     - à partir de 2010: « printemps arabes », qui renversent la plupart des régimes autoritaires (sauf en Syrie).

     - 2011 : intervention internationale (ONU) en Libye, mais aucun suivi de la situation politique, qui tourne au chaos, cz dont profitent les Islamistes radicaux.

 

    Cette brève chronologie n’est naturellement pas exhaustive (voir à ce sujet plus de détails ICI et dans le rapport que j’ai présenté à l’Assemblée nationale le 12 décembre 2001). Elle montre quand même que les désordres du Moyen-Orient ont des origines multiples et que les Occidentaux, notamment les Américains, y ont pris toute leur part !

 

      Aujourd’hui, face à la nouvelle forme de la menace terroriste et devant les désastres qu’elle peut engendrer, il ne faut pas se tromper de diagnostic et de remèdeNous n’avons pas à nous impliquer directement dans le conflit entre Sunnites et Chiites, qui n’a d’ailleurs plus grand-chose à voir avec un affrontement religieux et qui a connu des formes diverses au cours des siècles. Par contre, nous devons désigner l’adversaire principal et nous donner les moyens de le combattre et de le réduire.

 

      Cette lutte prendra du temps et il serait naïf de croire que quelques frappes aériennes et une illusoire (et dangereuse) action au sol en Syrie, sous l’égide de pays occidentaux, permettraient de venir à bout de l’EI.

 

       La seule solution pour conjurer ces périls est de nature politico-militaire. Elle suppose une négociation entre les pays qui ont intérêt, à des titres divers, à mettre un terme à l’emprise et au développement de l’EI. Les évolutions de plusieurs de ces pays (Russie, Iran, Arabie Saoudite notamment) sur la scène internationale indiquent qu’une telle solution politico-militaire est vraisemblable.

 

      Quant à l’attitude à adopter à l’égard de Bachar el Assad, l’idée d’une transition politique semble faire son chemin. Il est heureux que ceux qui rejetaient cette perspective avec fermeté il n’y a pas longtemps semblent vouloir se faire plus discrets. Je n’oublie pas que la conférence de Genève de juin 2012 parlait déjà de constituer en Syrie un « gouvernement de transition doté des pleins pouvoirs » et que, dans une tribune publiée le 27 février 2015, Laurent Fabius et Philip Hammond (ministre britannique des affaires étrangères) ont admis que cet organe gouvernemental devrait comprendre « certaines structures du régime existant ».

 

      Alors, vite, que les décideurs prennent les initiatives courageuses qui permettront enfin de traiter les causes des drames qui ensanglantent les pays du Moyen-Orient et qui commencent, sous d’autres formes, à affecter dangereusement les pays européens. 

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J
Merci Paul pour l éclaircissement xx.
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C
Merci Paul pour cette mise en perspective. Je diffuse largement (j'essaie à l'Élysée, mais je ne suis pas certain d'avoir une bonne écoute !). Amitiés JP COTÉ
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F
Cher Paul, J'ai bien lu et très attentivement ton texte, "Traiter enfin les causes du désordre !"<br /> Je souhaite ici et me permets t'apporter un son de cloche différent, complémentaire par rapport à ton analyse qui est très intéressante.<br /> <br /> Analyse certes pertinente, mais ce texte exprime "une vision assez parcellaire" par rapport à la réalité ainsi que sur l'origine de la situation. Ce qui se passe aujourd'hui, dans un monde devenu fou et incontrôlable notamment, par l'action des hommes et dirigeants politiques qui ne seraient pas à la hauteur de leurs fonctions, de l'Histoire puis à la mesure du destin de notre humanité comme le fut Jean Jaurès, juste avant la première guerre mondiale, puis d'autre comme le général de Gaule sur la question algérienne et l'Indochine. Aussi, quelques années plus tard F. Mitterrand, évidemment, ce n'est pas un hasard que le feu Président Mitterrand s'est montré très lucide, sur le "conflit des Balkan" et le morcellement de l'ex-Yougoslavie, sur l'unification des deux Allemagne, l'éclipse de l'URSS ou sur la première guerre d'Irak ou encore bien que très tardivement, sur le solutionnement du conflit palestinien.<br /> Le président Mitterrand a su refuser aux Américains le survol de la France pour aller bombarder la Libye du Colonel Kadhafi. Très sincèrement ce qui nous manque aujourd'hui, réellement, c'est des "Grands Hommes" politiques capables, comme Jean Jaurès, Homme de Paix, visionnaire et lucide sur l'avenir de notre Monde. <br /> Hors aujourd'hui, nous sombrons tous et collectivement vers un chao généralisé.<br /> <br /> Paul, ton texte relate fort bien un aspect instantané très "photographique" de la situation dans ces régions sources de conflits, de guerres et crises. Il ne faut pas occulter certains autres évènements historiques dont la responsabilité occidentale qui reste très implicite. Je citerai uniquement deux périodes clefs de notre histoire lointaine du siècle dernier au plus récente .<br /> <br /> Les accords de Lausanne et le morcellement de l'empire ottoman avec les conséquences que l'on sait. Puis l'histoire géostratégique de l'Iran avec le limogeage de Mohammad Mossadegh "homme Laïc et intègre" pour implanter à sa place le Chah, certes homme moderne et intelligent pour son pays, dans une première phase puis dans une seconde phase le soutien de l'ImamKhomeiny, "homme de religion et intégriste" et son intronisation dans une république surréaliste et religieuse, ce qui a fait sombré ce pays dans une oligarchie religieuse et réactionnaire, dans laquelle on peut mesurer aujourd'hui, l'effet néfaste "déstabilisateur" sur une toute une Région dans un premier temps puis sur le reste du monde.<br /> <br /> Depuis 1948, l'absence de volonté occidentale pour régler le conflit "israélo-arabe et israélo-palestinien" Puis avec la chute du Mur de Berlin, en 1992, avec la dislocation de l'empire Soviétique dans toutes ses dimensions géopolitiques et géostratégiques entrainant, l'invasion de l'Afghanistan par les forces "islamistes-wahhabites-djihadistes"- pour devenir "takfiristes", tout cela est appuyé par les pays occidentaux avec l'invasion et la destruction de l'Etat irakien, plus récemment le bombardement et la destruction d'un régime, son Etat et la liquidation de son chef Mouammar Kadhafi, cela à nos portes et frontières les plus proches. <br /> Hier comme aujourd'hui, des "apprentis sorciers" proposent aux chefs des Etats, de bombarder, détruire, ou éliminer tel chef d'Etat. <br /> Oui - Paul, tout cela se passe ainsi et dépasse l'entendement, c'est très grave et ne règle en rien la situation. <br /> <br /> Hier la "diplomatie parallèle" et de guerre en la personne de BHL et ses "Groupes Ethnico-philosophique", propose de s'investir en Libye. Ces vœux sont réalisés pourtant avec "mandat onusien" conforme, bien entendu, ainsi se fut l'élimination d'un chef d'Etat et la destruction d'un Etat induisant un désordre total dans la "zone Sahélo-Saharienne" et dans les territoires de " l'Afrique Occidentale", l'implantation des djihado-terroristes, qui se sont organisés depuis en une entreprise d'exportation de "l'international-terrorisme" à travers "AQMI", "Ansar-Al-charia", Okba Ibn Nafaâ", "Boko-Haram" etc. ainsi que dans leurs succursales directes ou indirecte dans le monde. Cette même Diplomatie parallèle de guerre n'a pas mesurer la dimension que réserve le bassin d'emploi et le rôle central de prospérité de la Libye et son Etat, pour les pays limitrophes ou encore pour d'autres plus lointains comme les Philippines, les Indochinois, les Turques puis d'autres ressortissants des pays de l'Europe de l'Est et de l'Asie centrale. La crise des refugiés en Tunisie a démontré un décompte de plus 6 millions de réfugiés venant de plus de 95 nationalités du monde qui occupaient des emplois dans ce pays prospère, qui était la Libye du Colonel Kadhafi. Tous ces réfugiés ont quitté la Libye après la guerre transitant par la Tunisie. Oui la Libye servait de sasse de sécurité et un bassins d'emplois pour les pays africains aussi, ce pays constituait une certaines sources d'argent, d'aides et de subventions pour tous ces mêmes Etats. <br /> <br /> Aujourd'hui , cette même "Diplomatie parallèle et guerrière" nous insiste et réitérer son forcing pour aller en Syrie et jeter le même chao<br /> <br /> Paul, je ne sais pas si tu te souviens, cela a été bien évoqué et illustré lors du colloque de l'IRIS à l'UNESCO consacré à l'Afrique, dans lequel nous nous sommes croisés à l'époque . Tu es intervenu d'ailleurs, sur un de ces aspects.<br /> <br /> Aussi, hier le président Vladimir Poutine intervenait à un moment clef de cette situation cataclysmique et poudrière au Proche Orient. Il a au moins le mérite de maintenir une certaine lucidité sur ce conflit international à géométrie géostratégique très variable. Ce conflit et guerre, qui a beaucoup perdu, depuis longtemps, son sens de révolte ou de Printemps arabe. Dès lors depuis 3 ans quand on a décidé d'armer des mercenaires aidés et formés par des membres des forces spéciales des uns et des autres pour faire tomber le régime.<br /> <br /> Bref personnellement, hier j'étais contre l'intervention "l'invasion occidentale en Irak" comme celle en Libye avec la participation française notamment en Libye malgré une "résolution onusienne de circonstance". Comme aujourd'hui, je suis et reste opposé aux frappes et à une intervention étrangère en Syrie. Parce que tout cela, ne réglera en rien cette situation déjà particulièrement chaotique et entrainant une situation de désastre dans la Région du PO, non seulement en Europe mais aussi ailleurs. Nous avançons implicitement vers une situation nouvelle, totalement incertaine et inconnue, certainement, plus chaotique plus funeste pour le monde entier.<br /> <br /> Cher Paul, la guerre est une très mauvaise "recommandation", la solution de Paix comme le disait fortement, Jean Jaurès il y'a tout juste un siècle, son opposition à la guerre, François Mitterrand, le Général de Gaule ainsi que le président J. Chirac lors de la seconde guerre et invasion de l'Irak, ont su imposé une vision courageuse pour s'opposer respectivement à des guerres jugées injustes et dangereuses .<br /> <br /> Nous pouvons aussi, dire que la situation en Syrie n'a rien à voir avec les le Printemps arabe. c'est une guerre internationalisée par des obscurantistes contre le modernisme et l'ouverture. Dans cette position, nous donnons l'impression et nous sommes aux côtés des régimes rétrogrades des wahhabites djihadiste-takfiristes particulièrement féroces et terroriste contre un régime, qui est certes responsable en partie de la situation mais reste un régime laïc au bon sens politique et progressiste. Très sincèrement, la France depuis l'ère Sarkozy adopte une posture contre ses propres intérêts et sort à chaque fois plus perdante et affaiblit politiquement, diplomatiquement et même socialement.