Les terribles souffrances des Japonais et leurs angoisses devant les dangers qui les menacent éclipsent dans les médias les autres drames de la planète. Je
le comprends tout à fait, car nous devons faire preuve de compassion à l’égard du peuple japonais et manifester notre solidarité.
N’oublions pas cependant que d’autres peuples traversent en ce moment des épreuves, qui, sans être de même nature et sans qu’il soit question de définir une échelle de l’horreur, risquent de devenir insupportables.
Insupportable, par exemple, l’écrasement programmé par Kadhafi des populations
libyennes révoltées, sans que la Communauté internationale décide au moins d’empêcher le tyran d’utiliser son aviation pour mitrailler les opposants ! Depuis 3 semaines, elle
« réfléchit », elle « se concerte », elle « hésite », elle « étudie »….Chacun voit qu’au-delà des discours, des effets
de manche, des dénonciations, les arguments techniques invoqués ne tiennent pas. Ils ne sont que les paravents d’une absence de volonté politique, qu’il va bien falloir analyser
et dénoncer.
Le plus mauvais exemple a malheureusement été donné par Barack Obama, qui n’a rien trouvé de mieux à dire, dans la plus pure langue de bois, que la
Communauté internationale « a l’obligation de faire ce qu’elle peut ». Il est vrai qu’il y a près de 2 ans, en marge du sommet du G8, il avait déclaré : « Dans
certaines circonstances exceptionnelles, l’intervention internationale devient un impératif moral », en invoquant l’absence coupable de l’ONU au moment du déclenchement du génocide du
Rwanda en avril 1994. « Mais », ajoutait-il, « il doit y avoir un fort sentiment d’indignation internationale. Le seuil à partir duquel une
intervention est appropriée doit être très élevé ».
Et, pour que les choses soient claires, Barack Obama vient de préciser qu'une intervention se justifiera "si on commence à voir des civils sans défense massacrés par les forces de Kadhafi". Il faut donc des images fortes, des morts, du sang à la une, des massacres….si possible à la télévision, pour que la Communauté internationale puisse mener une « intervention appropriée » !
Dans le cas de la Libye, qu’ils se rassurent, il n’y aura pas d’images. Les journalistes et les photographes sont tenus à distance par Kadhafi, certains d’entre eux ont été violentés et même torturés. On ne saura que plus tard les horreurs de la « reprise en main » par les fidèles du dictateur. Et puis, comme un malheur ne vient jamais seul, les écrans sont occupés par le drame qui martyrise le Japon.
Alors, que dire, que faire ? Comme le conseille Stéphane Hessel : « Indignons-nous »….c’est tout ce qu’il nous reste pour l'instant.