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Le blog de Paul Quilès

Réflexions et informations sur la paix et le désarmement nucléaire, sur la démocratie et sur l'actualité politique.

Comment un « nouveau monde » peut-il naître ?

Publié le 23 Mai 2020 par Paul Quilès in Désarmement nucléaire

Comment un « nouveau monde » peut-il naître ?

Tribune de Paul Quilès

publiée dans la revue Planète Paix (mai 2020)

La pandémie ne connaît pas de frontière et met en évidence la nécessité d’une coopération multilatérale pour construire la paix et la sécurité.

La pandémie du Covid-19 frappe l’humanité entière. Elle affecte tous les États, la santé de leurs populations, leur économie, leur gouvernance. Elle remet en cause les principes mêmes et les modalités de la coopération internationale. Cette crise sanitaire et économique sans précédent devrait faire émerger une prise de conscience de l’interdépendance de nos sociétés, en rappelant les vraies priorités de notre monde, qui réclament avant tout une solidarité humaine.

Nombre d’États, notamment européens, ont tenté d’apporter une réponse individuelle à la crise, en vain. Face à l’ampleur et l’urgence du défi sanitaire, il est devenu évident que la gestion globale et effective de la pandémie passe par une coopération internationale et régionale en matière de sécurité sanitaire.

Cette lutte contre le Covid-19 doit s’accompagner de réponses à d’autres défis : soutenir les plus démunis, porter secours aux populations dont les systèmes de santé ne peuvent lutter contre la pandémie, faire évoluer nos sociétés et nos économies vers des modes de développement plus écologiques. Il s’agit là d’enjeux à l’échelle de l’humanité. C’est en y répondant que se dessinera le « nouveau monde » dont il est de plus en plus question aujourd’hui.

Une autre condition pour que puisse se construire ce « nouveau monde » est que l’ensemble des États soit en mesure de garantir la sécurité internationale. Or, c’est une vision passéiste des vrais enjeux de sécurité qui guide actuellement les puissances mondiales détentrices de l’arme nucléaire. Incapables de voir que leur stratégie de dissuasion, prétendument infaillible, est vaine pour combattre les menaces du XXIème siècle, elles ont repris une course aux armements, qui se traduit notamment par des dépenses colossales investies dans le développement et la modernisation des armements nucléaires. Rien que pour la France, c’est un budget de 37 milliards d’euros qui est alloué par la Loi de Programmation Militaire à la modernisation de l’armement nucléaire pour les années 2019 à 2025.

Alors qu’aujourd’hui il apparaît indispensable de reconstruire le système de santé et de répondre aux besoins sociaux, ces sommes allouées à une arme inutile et dangereuse paraissent encore plus absurdes. Comme les autres menaces transnationales pour la sécurité dans un monde globalisé, la pandémie ne connaît pas de frontières. Elle vient dans la crise actuelle illustrer les dangers de l’unilatéralisme et la nécessité absolue d’une approche globale, multilatérale et fondée sur la coopération, plutôt que sur des mesures individuelles et égoïstes.

Une autre conséquence majeure de cette crise sur la coopération en matière de désarmement est que les efforts de maîtrise des armements et de désarmement risquent d’être ralentis. Parmi les nombreux évènements annulés ou reportés, figure la Conférence d’examen du Traité sur la Non-Prolifération des armes nucléaires (TNP), qui devait se tenir à New York fin avril 2020. Ce rassemblement devait être l’occasion de célébrer le 50ème anniversaire de l’entrée en vigueur de cet important traité qui a limité la propagation des armes nucléaires. Il était d’autant plus important que les dispositifs russo-américains de maîtrise des armements sont progressivement démantelés.

Si l’idée d’un « autre monde » a des chances de voir le jour après la pandémie, il ne pourra se construire qu’en mettant fin à la course aux armements nucléaires et en engageant un véritable processus de désarmement nucléaire multilatéral, progressif et équilibré.

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