Réflexions à haute voix sur l’activisme de N. Sarkozy en matière de défense,
par Paul Quilès
Une politique brouillonne
Un jour, il redéfinit la politique de dissuasion nucléaire ; un autre jour, il laisse entendre que la France va revenir dans le commandement militaire intégré de l’OTAN ; en déplacement au Cap, il annonce la fin des implantations militaires en Afrique ; reçu dans les Emirats arabes, il s’engage à créer une base navale à Abu Dhabi ; en visite à Londres, il promet l’envoi de 1000 soldats français en Afghanistan. Si l’on ajoute à cette longue liste les fuites (organisées ?) faisant état d’une vaste réduction des effectifs et des moyens des armées -50 000 emplois supprimés, 53 implantations fermées, 109 sites « allégés »-, on peut commencer à se demander à quoi servira le Livre Blanc de la défense, qui doit être rendu public dans quelques semaines !
J’ai moi-même été auditionné par la commission qui prépare depuis 8 mois ce document, censé définir les menaces qui justifient notre politique de défense et en préciser les grandes orientations. Je suis assez scandalisé que le Président prenne les choses à l’envers et annonce les moyens qu’il compte mettre en œuvre avant même que le Livre Blanc ait défini les menaces et la stratégie. En réalité, N. Sarkozy entend bien décider lui-même, sans la moindre concertation et sans vrai débat, de nous entraîner dans une voie que je considère comme dangereuse.
La dérive afghane
Ce qui se passe avec la décision sur l’Afghanistan est emblématique de cette dérive. On sait que le combat contre le terrorisme dans ce pays ne se gagnera que par le soutien des populations. Or
rien n’a été fait pour obtenir ce soutien. Les Américains dépensent 100 millions de dollars par jour dans cette guerre, alors que l’aide internationale n’est que de 7 millions de dollars
par jour, si bien que les Afghans ont le sentiment de vivre avec une armée d’occupation, alors qu’il faudrait une armée de reconstruction.
Les Français doivent savoir que l’alignement de leur Président sur les Américains, qui se
confirme, présente de sérieux dangers. Le traitement qu’ont fait les Etats-Unis de la menace terroriste depuis 2001 par la seule option militaire s’est en effet traduit par plus de terrorisme et
plus de menaces. N. Sarkozy s'ingénie tellement à copier ces recettes (qui ont échoué) qu'on peut imaginer, sans trop de risque de se tromper, qu'en 2003, il aurait certainement
emboîté le pas aux Américains et qu'il aurait envoyé des troupes françaises dans ce qui est tristement devenu le bourbier irakien!